Chronique

Petit aveu d’une maraîchère sur le radis

Avec son gros avantage d’être parmi les légumes les plus rapides à faire pousser, le radis a la réputation d’être le légume parfait pour les jardiniers débutants.
Pourtant, il cause bien des maux de tête à plusieurs maraîchers professionnels.
Le radis, n’est pas un légume facile à cultiver. C’est l’un de nos plus gros défis maraîchers à la ferme. (Ho que cela fait du bien de le dire!)

Pourquoi on le cultive

Comme sa croissance est rapide, et que les légumes se font rares tôt en saison, le radis est nécessaire pour garnir nos étalages. On enchaîne donc plusieurs semis à intervalles de 2 semaines….en croisant les doigts . Les débuts de saison sont donc remplis de radis….et surtout de radis manqués et déclassés aux champs. On récolte souvent plus de frustration que de radis.

Les défis de sa culture

Habituellement, les 2 premières semaines de récoltes se passent sans trop de larmes. Mais après, tout dégringole…1 radis déclassé pour 3 gardés….puis le ratio s’empire…jusqu’à ce que qu’il n’y ait que 10% des radis qui passent l’inspection. Très souvent la maraîchère que je suis pogne les nerfs bien avant et abandonne le reste de la récolte au champ en début juillet, en se jurant de ne plus jamais faire de radis.
C’est que les radis, toutes les bibittes du monde aiment ça. On a beau mettre un filet, c’est inévitable, ils ont été goûtés avant la cueillette.
En plus, ces beaux petits radis, sont aussi très capricieux. Trop chaud ou trop sec ils sont fibreux ou montent à la graine (en 3 jours). Trop d’eau ils fendent au champ (en 3 jours)..ou plus frustrant encore ils fendent dans leur bac au frigo après la récolte (en 3 heures!). Et c’est sans parler de leur carence en bore qui nous demande de leur donner des suppléments d’éléments pour les maintenir en santé et éviter que la racine noircisse.
Les beaux radis que vous voyez en épicerie sont cultivés dans des très grandes serres spécialisées dans cette culture, dans un climat à température et humidité contrôlées et sans bibittes.
Sur une petite ferme diversifiée, c’est une autre histoire.

Amour et haine, le cercle vicieux

Puis la mi-août arrive. On évalue nos récoltes à venir et nos champs. On est trop fatigués pour se poser trop de questions. Et on se dit qu’on a le temps de semer encore quelques cultures rapides pour l’automne, comme le pakchoï, le navet…et le radis.
Et c’est là qu’on se réconcilie. En septembre, quand la récolte de radis d’automne est prête. Il fait frais et humide. Les bibittes se sont calmées. Et les radis sont plus beaux et bons que jamais. Et il n’en faut pas plus pour retomber dans le panneau. Et les remettre au plan de culture pour le prochain printemps, en se disant que cette fois-ci on va les réussir sans pleurer.
Un vrai cercle vicieux.

Madeleine Olivier

Madeleine Olivier

Chroniqueuse